Un jeune américain s’engage
Le 21 juin 1941 il a 20 ans et se présente à Detroit (Michigan) pour être engagé volontaire, le 8 décembre 1941 il est appelé. Le 6 avril 1942 il signe un enrôlement pour toute la période à venir de la guerre plus 6 mois. Son dossier n° 16062160 précise qu’il mesure 68 pouces (1,73 m) et pèse 131 livres (59,5 kg), il est célibataire. Son matricule est le 0-746131.
Il part en formation au 20th Fighter Group en Californie.
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Le 1er lieutenant Ferdinand E Lefevre posant devant son avion. 1944. |
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État-major de la base de King’s Cliffe. |
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Cantonnements américains de King’s Cliffe. |
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La salle des cartes de la base américaine de King’s Cliffe. On y aperçoit le trait blanc vers la Touraine. |
Les premiers entraînements sont délicats, de nombreux accidents trahissent la jeunesse et l’inexpérience des 132 pilotes. Mais cela n’entame en rien leur volonté et leur courage.
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Tableau d’affectation des pilotes. |
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Le service statistique et ses « superbes » bureaux de King’s Cliffe. |
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2e rapport rectifié de Lefevre (orthographié ici Le Fevre) pour la journée du 8 avril 1944. Source. |
Le P-38
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P-38 en préparation sous son hangar de King’s Cliffe. |
Les plus longues missions que l’escadron réalisera avec ces avions ont été des missions d’accompagnement de bombardements sur Bordeaux, à 2000 km de leur base, soit 4000 km aller-retour avec le même plein, montées, descentes et attaques comprises !
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Plan écorché d’un P-38. Source. |
Note : c’est sur le même type d’avion qu’Antoine de Saint-Exupéry disparaîtra au dessus de la Méditerranée le 31 juillet 1944.
La mission du 28 avril 1944
À Beauregard, juste en face de la piscine, où il y a une terrasse, il y avait un préfabriqué où logeaient des artilleurs de la Flak (défense aérienne allemande). Ils avaient au moins 3 pièces de DCA au dessus de Saint-Georges, après la côte du Peuplier, dénommée ainsi à cause d’un énorme peuplier d’Italie qui y prospérait, à la Cholterie juste avant Montgouverne. C’était des canons de 88 (88 mm de diamètre) et je peux vous dire que lorsque ça tirait, les éclats retombaient jusque sur les maisons et les jardins de Beauregard. Il ne faisait pas bon de rester dehors.Il y a avait aussi à cet endroit un énorme projecteur pour éclairer les avions la nuit. Les allemands avaient aussi creusé tout autour des trous équipés de mitrailleuses pour protéger le site.On voyaient les allemands monter en rang d’oignons pour la relève de l’artillerie.
À Champlong, au niveau de l’autoroute actuelle, il y avait des canons de 20 ou 30 mm et entre Chatenay et Mosny il y avait un énorme système d’écoute, des sortes d’entonnoirs ou de grands pavillons de phonographes qui permettaient de détecter le bruit des avions qui arrivaient et prévenir la base de Parçay et l’artillerie. Il n’y avait pas de radars à cette époque.
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Flak et tout le groupe chargé de la faire fonctionner. |
En face du Bon Accueil (aujourd’hui L’Oubliette) il y avait un tonnelier, on traversait la Bédoire et il y avait la scierie et la menuiserie de Gaston Buant. C’est entre ces bâtiments, le long de la Bédoire, que s’est écrasé l’avion américain. Pendant des années des morceaux de l’avion sont restés là.
Je ne sais pas qui a recueilli le corps et où il fut provisoirement inhumé, mais aujourd’hui il repose dans un immense cimetière américain situé en Belgique, près de Liège, à Neuville-en-Condroz. L’une des 5329 tombes…
Au total, sur l’effectif des 132 pilotes engagés dans la deuxième guerre mondiale, 73 ont été tués en mission.
Le rapport du MACR n° 4416
Traduction de R. Pezzani :
Nous volions dans l’équipe « Avoine Rouge 2 ». Nous étions à l’arrière et au dessus des bombardiers au moment où ils passaient au dessus de la cible. Juste après qu’ils aient jeté leurs bombes je vis la Flak (D.C.A.) frapper l’avion du Lieutenant Le Fevre. Le réservoir de secours gauche explosa et se mit à brûler. Il fit une demi rotation, commença à chuter et se mit en vrille, son moteur gauche crachait une fumée inquiétante, mais après qu’il eut perdu six mille pieds, il commença à reprendre le contrôle de l’avion et stoppa le mouvement de vrille. Il était alors sur une descente à 60 degrés qu’il semblait maîtriser. La fumée s’était réduite à un mince filet. Il se dirigeait vers le nord-est. C’était la dernière fois que je le voyais. Un peu plus tard je regardais vers l’arrière, mais je ne vis aucun endroit où un avion se serait écrasé. »
L’information était juste, mais malheureusement l’avion ne s’était pas posé car il s’était finalement écrasé à Rochecorbon, à l’est de Tours.
C’est donc probablement la DCA installée en haut de la vallée de Saint-Georges qui avait atteint l’avion de l’américain au moment où il traversait la Loire en direction du nord.
La stèle commémorative
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Journal municipal de juin 1986. |
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Hommage rendu le 8 mai 2014. |
Pour en savoir plus :
- Claude Archambault a publié plusieurs ouvrages sur les chutes d’avions pendant la guerre. Son dernier ouvrage : Exécutez l’Air Commodore !.
- un film récent montrant le P-38 permettant d’en bien évaluer la forme originale.
- le site concernant le 20th Fighter Group Projet, en anglais mais abondamment illustré (plusieurs images de ce texte en proviennent).
- un autre site toujours en anglais, le 20th Fighter Wing Association nous rappelle que ce groupe qui existe toujours avait connu ses débuts en 1927 en étant équipé … de ballons.
- Aérostèles, un site en français qui inventorie les stèles et lieux de mémoire aéronautique et qui consacre une page à celle de Rochecorbon.
- le 5 août 1944 un autre avion P-38 explosait en vol au dessus de Reugny.